Un logiciel révolutionnaire
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ScIAssors est un outil développé par une équipe de chercheurs, mixte, de l’université américaine d’Harvard et du M.I.T. de Boston. D’un côté des experts en littérature, de l’autre des cadors en intelligence artificielles. Pour le dire vite, scIAssors est un logiciel de copy-editing (préparation de texte) fonctionnant sur le texte un peu comme Midjourney fonctionne sur l’image. C’est donc à la base une IA qui analyse un texte et le prépare pour la publication.
Ce qui fait la force de ce logiciel révolutionnaire et sa profonde originalité, ce sont ses mods.
Le plus simple à comprendre est le mod neutral (ou root, pour les initiés) qui va juste se contenter de repérer les répétitions, les incohérences et les redites. En neutral, scIAssors vous propose toute une série de modifications que vous acceptez ou refusez.
Des possibilités infinies
Mais il existe bien d’autres mods, plus d’une trentaine au moment où j’écris ces lignes, certains très sérieux comme les mods de coupe « Stephen King », « Raymond Carver » ou « Yôko Ogawa ». En mode « Stephen King » les coupes ne peuvent excéder 5% de la longueur totale du texte, en « Raymond Carver » c’est 50%, et en « Yôko Ogawa » 91,7%.
D’autres mods, appelés créatifs, sont plus inventifs comme le « Cormac McCarthy » qui est par exemple capable de transformer un roman SAS de Gérard de Villiers en roman d’espionnage baroque et infusé d’un profond fanatisme chrétien. Passer une romance dans le mod « Cormac McCarthy » (niveau hardcore, le plus élévé), c’est un peu comme demander à Noboru Iguchi (Machine girl, Zombie ass) de tourner le dessin-animé Walt Disney de Noël.
Nous avons passé au mode « Yôko Ogawa » (niveau medium) un roman français de la rentrée SF de 2022 connu pour sa pagination excessive ; l’œuvre en surpoids morbide (647 pages) devient alors une médiocre novella de 123 pages (les modes de coupe scIAssors coupent, c’est leur raison d’être, mais ne réécrivent pas, contrairement aux mods créatifs comme le « Cormac McCarthy »). Le mode « Yogo Ogawa » non seulement coupe le supperflu, mais crée des ponts elliptiques (elliptic bridges). On peut ensuite passer le contenu modifié dans un autre mod, les possibilités sont infinies.
Par curiosité, nous avons passé notre grand succès de l’année, Morgane Pendragon de Jean-Laurent Del Socorro, dans le mod créatif « H.P. Lovecraft » (niveau hardcore), le résultat est évidemment impubliable, globalement incompréhensible (et en même temps peuplé de passages hallucinés. Par exemple, le sort réservé à Merlin par l’intelligence artificielle de scIAssors est tout sauf indicible). Autre particularité, ce mod transforme tous les personnages féminins du livre en personnages masculins, ce qui est pour le moins cocasse. A dire vrai , le résultat final fait davantage penser à Brian Yuzna qu’à H.P. Lovecraft.
Un gain de compétitivité bienvenu
Albin Michel Imaginaire est fier de vous annoncer que nous avons été retenus comme bêta-testeurs pour la version française de scIAssors. L’idée c’est de passer toutes nos traductions au mod « Raymond Carver » (niveau advanced) qui, après divers essais, nous semble le plus adapté à l’imaginaire. Au moment de la hausse du prix du papier, il est très intéressant sur le plan économique de pouvoir réduire la longueur des livres. Dans un second temps, nous pourrons publier les versions intégrales en édition reliée, ce qui sur le plan marketing sera forcément très pertinent.
Dans un marché toujours plus tendu, où la réduction des coûts devient la valeur cardinale du travail d’éditeur, des outils comme scIAssors représentent un réel avantage compétitif.
Gilles Dumay, directeur d’Albin Michel Imaginaire
Intéressant. Ce n’est pas un poisson d’avril🙂..
Cette autrice dont vous parlez je crois que c’est Yoko Ogawa et non Yogo .Oups.
Yôko Ogawa pour être précis. Merci de votre vigilance.
Euh, il n’y a pas un risque de voir AMI réinventer les 30% de coup de mise dans le monde du polar avant l’arrivée de François Rivière, et donc de finir en mode Reader’s Digest ?
Personnellement, je préfère lire un texte intégral (un roman ne se réduisant pas à son intrigue, ce sont les à-côtés qui lui donnent sa personnalité).
La question est-elle sérieuse où décalée (dans le temps) ?
Décalée, bien sûr ! ^_^ mais comme tous les poissons d’avril, celui-ci contient un côté inquiétant, d’où ma réaction.